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Expositions

Cher peintre kitsch

La nouvelle exposition du Centre Pompidou donne de la peinture actuelle un visage bien vulgaire...


Entrée de l'expo
© Françoise Monnin
« C’est Pigalle et Dallas réunis. Pourquoi est-ce que je paie des impôts ? Pour développer cette sous culture ? Pour subir cette colonisation à domicile, dans une indifférence totale ? ». Le peintre Crémonini, membre de l’Institut, ne mâche pas ses mots, à la sortie du vernissage de l’exposition «Cher Peintre». Il faut dire que les toiles réunies ont tout pour déranger : elles ont été sélectionnées pour leur manière de dialoguer avec l’image populaire, le kitsch. Mais s’agit-il bien ici d’un échange ? Les artistes choisis se contentent, pour l’essentiel, de recycler avec cynisme un certain nombre d’archétypes, tels que la peinture montmartroise, l’enseigne de boutique africaine, l’affiche de cinéma indienne ou la bande dessinée américaine. L’ensemble prête à sourire, n’incite pas à la contemplation, et moins encore à la méditation.

Des nus peu flatteurs
Les commissaires de l’événement (Alison M.Gingeras du Centre Pompidou, Sabine Falle de la Kunsthalle de Vienne et Blazenka Perica de la Kunsthalle de Francfort) ont articulé le tout en choisissant, parmi les artistes occidentaux d’aujourd’hui, ceux dont la pensée - pour peu que l’on puisse qualifier ainsi leur fonctionnement - a à voir avec celle de Francis Picabia. Au début des années quarante, en fin de carrière, il s’était en effet appliqué à reproduire gauchement, à l’huile, des photographies de nus, pêchées au hasard de magazines érotiques. Six de ces toiles constituent la première salle de l’exposition. La salle suivante regroupe des nus signés Bernard Buffet, dix ans plus tard, mieux dessinés mais tout aussi tristes. Puis viennent des Polke, des Katz, beaucoup de Kippenberger... C’est à cet artiste allemand quadragénaire qu’on a emprunté le titre de l’exposition. « Cher peintre, peins moi », avait-il demandé en 1981, à un illustrateur spécialisé dans l’affiche de cinéma, qu’il avait chargé, une année durant, de réaliser à sa place ses propres tableaux. Faut-il que l’on s’ennuie, dans certains ateliers, pour en arriver là...

Bâle connexion
Suivent des œuvres de Currin, Brown, Rauch, Benzaken (une composition en carreaux de céramique plus judicieuse que l’essentiel des toiles présentées), Perramant, Tuysmans (nettement plus intéressant d’habitude), Althof, Peython, Von Hellermann et Kauper. Lors du vernissage, les marchands de toutes ces jeunes vedettes étaient fort présents. « On se voit à Bâle », n’en finissaient-ils pas de se promettre. On y retrouvera en effet leurs poulains, présentés lors de la plus fameuse foire d’art contemporain, désormais labellisés Centre Pompidou.


 Françoise Monnin
14.06.2002