Buren se rangeTrès décoratif, Le Musée qui n’existait pas a été inauguré mardi soir au Centre Pompidou, en grande pompe. Le lendemain, une soirée mondaine était consacrée à l'artiste sur la terrasse des Galeries Lafayette. À quand l’Académie ?
| Le Musée qui n’existait pas © ADAGP
Photo : Françoise Monnin |
« Hu, hu, hu... » Le nouveau ministre de la Culture (président directeur général sortant du Centre Pompidou) pouffait de rire, mardi soir, dans l’une des salles du Musée qui n’existait pas. En compagnie des têtes pensantes les plus médiatiques de la culture officielle, Guy Amsellem, Bernard Blistène, Alfred Pacquement, Pierre Restany, et de l’artiste, Jean-Jacques Aillagon découvrait une installation, constituée des palissades du chantier du Palais-Royal. Souvenez vous, c’était en 1985. Les colonnes érigées là par Buren choquaient beaucoup. Les graffitis que l’on retrouve aujourd’hui sur ces palissades rafraîchissent la mémoire. « Le burin pour Buren », « les colonnes sont au Palais-Royal ce qu’un furoncle est à une fesse », « assassin maçonnique »… Aillagon rit. Les autres aussi. Puis ils continuent leur promenade, dans l’espace labyrinthique, constitué de quarante-deux modules cubiques, presque tous vides.
| Le Musée qui n’existait pas
© ADAGP
Photo : Françoise Monnin |
Art décoratif
L’artiste qui prétendait, en 1966, peindre « le dernier tableau » et « atteindre le degré zéro de la peinture », s’est intéressé à l’architecture intérieure à partir de 1975. Depuis, ses Cabanes éclatées, son Corridoroscope, tout comme son actuel Musée qui n’existait pas, témoignent d’une réflexion élémentaire sur la notion de cloison. À partir de motifs géométriques basiques, la rayure, mais aussi le triangle et le cercle, Buren crée ici, une fois encore, des ambiances, en diversifiant les matières. Miroir, bois brut, diapositives projetées... Beaucoup de jeux de claires-voies et de reflets. C’est très joli. On a l’impression, en visitant l’ensemble, de déambuler parmi les dernières tendances du luminaire, du tissu et des astuces d’ameublement.
Les clés du succès
Buren poursuit la visite guidée du ministre, au milieu des caméras, des photographes. Petit, le maître est vêtu de noir, a les cheveux gris, passe inaperçu. Ainsi le temps académise-t-il même les artistes qui veulent changer le monde (voire le détruire). Buren, trente-cinq ans après ses premiers scandales, n’a pas réglé son compte à la peinture. Il a simplement laissé le dessin aux autres artistes. Le succès international de son travail tient, on s’en rend compte désormais, moins à son ambition provocatrice qu’à ses qualités classiques, en matière de composition et de couleur. Son aptitude à l’intégration éphémère et perturbatrice, dans une architecture ou dans un paysage aussi spectaculaire qu’historique, constitue également une valeur. Cela symbolise simplement le passage de tout un chacun sur la terre : subversif à condition seulement d’être bref et lumineux.
| Françoise Monnin 27.06.2002 |
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