Hitchcock : l'art aux troussesComment mettre en scène les liens de Hitchcock avec le monde de l'art ? Réponse de Nathalie Crinière, muséographe de l'exposition présentée au centre Pompidou.
- La présentation des oeuvres à Beaubourg diffère de celle choisie précédemment au musée des beaux-Arts de Montréal. Pourquoi ?
Nathalie Crinière. L’ espace d’exposition à Montréal était divisés en un système de salles successives réduisant les choix en matière d’exposition. Le Centre Georges Pompidou permet une reconstruction intégrale de l’espace à partir d’un plateau totalement aménageable, ce qui donne plus de possibilités. Les cimaises ont été colorées en fonction des thèmes abordés, nous laissant libres d’opter pour des tons proches d’une salle à l’autre (entre Spectacle et Voyeurisme) ou pour des ruptures totales (entre Voyeurime et Le désir et le double). L’aménagement de l’espace associe salles rectangulaires et circulaires (cabinet Edgar Poe), espaces ouverts et fermés, jeux de projections lumineuses.
| Léon Spillaert, L'escalier, 1909,
lavis d'encre de Chine, aquarelle et
pastel sur papier.
© Collection particulière, Bruxelles |
- Quel est le schéma directeur de cette exposition ?
Nathalie Crinière. Les thèmes choisis relèvent bien sûr de l’oeuvre de Hichcock (femme, spectacle, voyeurisme...). Photographies, peintures, sculptures, photogrammes et extraits de films font revivre l’univers du cinéaste. Dans la conception même de l’exposition, un intéret tout particulier a été accordé aux effets de perspective. Cela a permis des interactions discrètes entre les salles : hublots, percées verticales dans les murs... La salle d’introduction est une véritable mise en ambiance : derrière les portes de cinéma, la musique de Bernard Herrmann nous révèle les objets fétiches du maître, présentés dans des écrins. Le thème du spectacle a été également exploité de manière cinématographique : des écrans de télévisions suspendus diffusent des extraits de scènes de cirque.
| Edward Hopper, Lighthouse hill,
1927, huile sur toile, 71,8 x 100, 3 cm
© Coll. Texas, Dallas Museum of Art |
- La muséographie tient-elle compte du regard du cinéaste ?
Nathalie Crinière. De nombreux clins d’oeil font référence à la manière de filmer du cinéaste. Ainsi la possibilité de tourner autours des oeuvres comme la caméra autours des acteurs : la position du Baiser de Rodin, placé au centre d’un hémicycle, ou celle de la Vénus restaurée de Man Ray me semblent assez révélateurs. La présentation des oeuvres demeure très épurée, privilégiant, à la manière du cinéaste, la suggestion discrète d’une ambiance. Hitchcock aurait été flatté de constater que le public reste attiré dans un premier temps par l’image animé des projections. Les oeuvres mises en relations évoquent l’influence des arts dans ses films : comparons la photographie Alethea de Julia Margaret Cameron avec Ingrid Bergman dans Under Capricorn : la ressemblance est indéniable. Les oeuvres présentées démontrent l’impact des arts sur les productions du maître et ,réciproquement, l’influence du cinéma hitchcockien dans les créations plastiques contemporaines.
| Stéphanie Magalhaes 10.08.2001 |
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