La dame de la Côte

Richissime héritière Rothschild, Béatrice Ephrussi (1864-1934) décide en 1905 de bâtir sur le site sauvage (c’est le sens du mot « ferratus » en latin) du Cap-Ferrat, près d’Antibes. Il n’accueille alors que quelques villégiateurs fortunés, comme le roi des Belges, dont la résidence « Les Cèdres » est toute proche. L’anecdote est connue : pour visualiser sa future villa, Béatrice de Rothschild exigea plusieurs maquettes grandeur nature. Il ne s’agit là que d’une des péripéties d’un chantier difficile, sur un terrain accidenté de 7 hectares que des centaines d’ouvriers durent viabiliser. Mais elle traduit bien le caractère difficile de la commanditaire, qui « brûla » plusieurs architectes dont Henri-Paul Nénot, grand prix de Rome, Edouard Niermans, l’auteur de l’hôtel Negresco à Nice, ou Albert Laprade, avant de s’entendre avec Aaron Messiah.

Renaissance des jardins
C’est qu’elle entendait avoir la haute main sur son projet tout en s’autorisant de fréquents changements d’avis. La villa, appelée « Ile-de-France », se devait d’être un pot-pourri de Renaissance italienne (ce dont témoignent ses façades vénitiennes ou son patio), de XVIIIe siècle français et d’influences orientales, enchâssé dans des jardins en terrasses. L’état de ces derniers, auquel ont collaboré Richard Walace, Howard Peto et Achille Duchêne, ne reflète plus les intentions initiales. En mauvais état dès les années 1920, ils ont été cruellement touchés par les gelées de 1985 qui ont fait disparaître de nombreuses essences. Remis à neuf avec des parterres impeccables, des bassins, des fabriques romantiques, ils sont devenus l’un des lieux les plus visités de la Côte d’Azur. Les intérieurs, avec le salon des singes, le salon chinois, les toiles de Fragonard et Boucher, le mobilier de Riesener, Boulle et Lancret ne présentent pas moins d’intérêt.