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Expositions

Noguchi sous toutes ses formes

À l’intersection de la sculpture, de l’architecture et du design, l’œuvre d’Isamu Noguchi est plurielle.


Isamu Noguchi, Sculptural design, salle 3.
© Thomas Dix / Vitra design Museum.
PARIS. Artiste nippo-américain, Isamu Noguchi (1904-1988) est à la fois sculpteur, scénographe, décorateur, paysagiste et architecte, ses travaux répondant aussi bien à une fonction pratique que sociale. Il fait la liaison entre les arts plastiques et les arts appliqués, une distinction classique qui reste en fait purement occidentale. Pour célébrer ce créateur, le Vitra Design Museum de Weil am Rhein, en Allemagne, a mis sur pied une exposition faisant appel à un autre artiste de renom, Robert Wilson, pour la scénographie. Le concept est dépouillé : aucun cartel, mais un dépliant pour découvrir les pièces au fur et à mesure du parcours, élaboré par thématiques successives. L’étape parisienne se fait naturellement à la Maison de la culture du Japon. On y retrouve l’essentiel des pièces de Noguchi dans une mise en scène tantôt dramatisée, tantôt chaleureuse, par des jeux de lumière et de matériaux. On découvre, tout d’abord, des éléments scéniques aux formes archaïques - un lit en forme d’os de dinosaure, une structure de tente aux airs vikings -, que l’artiste créa pour la papesse de la Modern Dance, Martha Graham, avec qui il travailla pendant près de trente ans à partir de 1935. Après le noir, la lumière dans une salle environnée de paille pour découvrir les déclinaisons de lampes Akari (qui signifie à la fois «lumière» et «légèreté» en japonais) en bambou et papier, sujet qui offre l’occasion à l’artiste «d’étendre la notion de sculpture, de l’objet reflétant la lumière à l’objet translucide».

Fontaines et escalier-escargot
Robert Wilson recrée in situ un jardin zen, selon un parcours circulaire au milieu de sculptures minérales, dans une ambiance tamisée. S’y côtoient les maquettes de Pylon - tour vrillée en aluminium et la fontaine du mémorial de H. E. Dodge & Son pour la Philip A. Hart Plaza de Détroit (1971-1979) -, des études de mobilier urbain et paysager en granit, ou la très belle pièce de bronze pour la piscine de Josef von Sternberg (1935), sur une idée de l’architecte Richard Neutra. La quatrième section présente les tables et les chaises aux formes sculpturales qu’il réalisa dans les années 1940-1950 pour Knoll et Herman Miller. Est également exposée la maquette d’étude pour Slide Mantra (1966-1985) : il s’agit d’un projet ludique en forme d’escalier-escargot présenté à la Biennale de Venise de 1986. Depuis 1991, une copie blanche est installée dans le Bayfront Park de Miami, une noire dans le parc Odori à Sapporo. Des bustes de personnages célèbres ponctuent ce voyage poétique, des travaux réalisés par Noguchi grâce à des mécènes fortunés à l’époque de la Grande Dépression. Ce n’est pas ce travail que l’on retiendra de l’artiste, mais bien son esprit créatif et débridé, léger et lumineux, comme le temps...


 Rafaël Magrou
08.10.2002