Bill Viola en copropriété

Mettre en commun ses ressources pour une opération coûteuse : la démarche en est à ses balbutiements même si l'on en parle depuis longtemps. Il y a quelques mois, le Chicago Art Institute et la San Francisco Museum of Modern Art ont entamé des discussions similaires pour faire entrer dans leurs collections un autoportrait de Felix Gonzalez-Torres. On semble en passe de franchir une nouvelle étape puisque les institutions qui négocient actuellement Five Angels for the Millennium, pour un prix estimé à 700 000 € auprès du marchand britannique Anthony d'Offay, proviennent de trois pays différents, sur deux continents… «Nous avons lancé le projet ensemble, explique Alfred Pacquement, le directeur du Musée national d'art moderne, à Beaubourg. Le prix sera donc partagé en trois parts égales. Le Whitney et la Tate ont pris un peu d'avance dans le financement mais nous sommes en discussion avancée avec un mécène potentiel.» Pour la Tate, c'est Lynn Forester de Rothschild, qui avance les fonds. Pour le Whitney, c'est Leonard Lauder, l'un des héritiers de la multinationale des cosmétiques, par ailleurs président du musée.

Rotation lente
L'opération s'assimile au principe de la copropriété, commun dans le secteur immobilier, en particulier dans les stations touristiques, qui consiste à se partager un logement dans le temps. Mais dans le cas d'une vidéo de 13 minutes qui montre, sur plusieurs parois, en utilisant un matériel complexe, un homme habillé plongeant et sortant d'une piscine ? «On ne pourra pas effectuer une rotation de quelques mois. L'ensemble est trop lourd à installer. Au début, l'œuvre restera peut-être un an dans chaque musée, en commençant sans doute par Londres, puis la durée pourra être étendue à deux ans.» Le mécanisme pose des problèmes épineux en termes d'assurance et, surtout, de contrat. «Mais ce ne sont pas des problèmes insurmontables. Et si nous lançons le processus, c'est que nous croyons à ce nouveau mode d'acquisition.»