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Expositions

Pour l’amour de Moore

Après Saint-Paul-de-Vence, Valenciennes consacre au grand sculpteur britannique une rétrospective modeste mais bien pensée.


Vue de l’exposition avec au premier
plan King and Queen, 1952-53,
bronze, 164 cm. À l’arrière plan, on
devine la galerie de peintures
baroques du musée.
© Françoise Monnin
VALENCIENNES. Trois petites salles. Quarante et une petites sculptures et vingt et un petits dessins. Une micro-exposition pour un très grand sculpteur. Mais une présentation extrêmement juste, intelligente, dont on termine la visite avec le sentiment d’avoir saisi l’essence de l’œuvre du maître britannique ! Comment, d’ailleurs, pourrait-il en aller autrement, dans la mesure où le seul endroit où l’on peut vraiment appréhender la monumentalité de l’univers de Moore, c’est un parc, conçu par l’artiste de son vivant, autour de son atelier, à Much Hadham, près de Londres. Là, des formes gigantesques s’épanouissent sur un gazon toujours vert, tandis que, dans l’atelier, maquettes et sources d’inspiration dialoguent, aujourd’hui encore. Tous ceux qui aiment Moore ne prendront pas le train jusqu’à Much Hadham. Ils iront plus facilement à Valenciennes, où le conservateur Patrick Ramade a conçu un accrochage thématique, autour de trois notions : «tête», «figure» et «idée». Heads, Figures and Ideas : «C’est, dit-il, le titre d’un recueil de lithographies de Moore, que le musée vient d’acheter, sur internet, à un libraire de New York. Il date de 1958 et a été réalisé à partir de carnets de croquis, destinés à la conception d’un monument pour l’Unesco. Le titre de ce recueil résume les préoccupations de l’artiste, qui a été, soixante ans durant, très productif».


Des lignes pures
Plus ou moins abstraites, toujours panthéistes, les sculptures présentées n’en finissent pas de fasciner. Leurs formes simples, organiques, inspirées par les arts primitifs et surtout par l’observation de la nature - des squelettes et des coquillages notamment -, se développent en dépit de la résistance de certains matériaux : ici, un béton coulé, là, une pierre de stalactite taillée. Les bronzes sont plus massifs. Les dessins, tellement puissants ! Ceux du début des années 1940, surtout, qui ont été réalisés à partir de l’observation des réfugiés dormant, la nuit, dans le métro de Londres pour échapper aux bombardements, ou ceux de mineurs de fonds, dans les boyaux de Castleford. Tous, donnent à l’être couché une signification propre au XXe siècle. Il y est question de fragilité et de résignation, mais sans pitié. Toujours, avec le souci de la grandeur, du monument. En croyant «sculpter l’air», Moore (1898-1986) a capté celui de son temps.


 Françoise Monnin
16.12.2002