Générosité bien ordonnée…Les incitations au mécénat instituées par la loi sur les Musées de France du 4 janvier 2002 viennent de faire l’objet d’une instruction fiscale qui en précise les modalités d’application.
Ces mesures, en date du 24 octobre, visent à enrichir les collections des Musées de France et à sauvegarder des trésors nationaux dont l’exportation a été refusée par l’administration. Sont définis comme trésors nationaux les biens appartenant aux collections publiques, les biens classés monuments historiques et ceux présentant un intérêt majeur au plan de l’histoire de l’art ou de l’archéologie. Le succès de ces mesures dépendra de l’attitude des ministres chargés de la culture et du budget, puisque le bénéfice des réductions d’impôt est soumis à leur agrément. Deux sortes d’actions de mécénat sont envisagées. La première est l’acquisition, au plus tard le 31 décembre 2006, d’un trésor national pour le compte de l’État, qui pourra le faire connaître par le biais du Journal officiel. L’entreprise mécène pourra réduire son impôt sur les sociétés de 90% du montant versé, sans toutefois que la réduction ne dépasse 50% du montant de l’impôt normalement dû. La seconde est l’acquisition d’un trésor national en pleine propriété par les entreprises assujetties à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu, qui ouvre droit à une réduction d’impôt de 40% du prix d’achat, sans plafonnement cette fois. L’entreprise doit s’engager à consentir par avance au classement du bien comme monument historique et à le mettre à disposition d’un Musée de France pendant une période de dix ans. Il est intéressant de constater que si l’offre d’achat d’un bien au profit de l’État doit être impérativement agréée dans les trois mois par les deux ministères, la loi ne leur impose aucun délai pour autoriser les acquisitions en pleine propriété. Ce flou sur le délai de réaction de l’administration pourrait dissuader plus d’une initiative d’entreprise mécène.
Et les artistes vivants ?
À côté de ces mesures consacrées aux trésors nationaux, l’instruction évoque deux autres modifications liées à la loi sur les Musées de France. Les dons aux Musées de France sont désormais déductibles, comme les dons aux fondations et associations reconnues d’utilité publique, à hauteur de 3,25 pour mille du chiffre d’affaires de l’entreprise mécène, et non plus dans la limite de 2,25 pour mille. L’incitation à l’acquisition d’œuvres d’artistes vivants est assouplie. Si l’entreprise est toujours tenue d’exposer les œuvres gratuitement dans un musée, ses locaux ou lors de manifestations, c’est pendant cinq ans, et non plus dix, et l’amortissement peut être étalé sur une durée raccourcie de dix à cinq ans. Cette accélération devra inciter les entreprises à réinvestir plus fréquemment dans les créations d’artistes vivants, mais il ne faut pas oublier que cette déduction ne pourra dépasser la limite annuelle de 3,25 pour mille du chiffre d’affaires, qui inclut toutes les dépenses de mécénat de la société. Ainsi, une entreprise qui effectue déjà des dons à des associations et fondations reconnues ou non d’utilité publique devra bien contrôler que l’usage de ces nouvelles incitations au mécénat n’entraîne pas un dépassement du seuil fatidique.
| Arnaud de Senilhes / Yann Queinnec Landwell & Associés - Avocats 17.12.2002 |
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