L’expressionnisme, c’est la vieMalgré ses insuffisances, une rétrospective montre bien la vitalité du mouvement allemand.
| Max Pechstein, Femme nue sur une
tenture rouge, 1911, collection privée,
Milan. © Complesso del Vittoriano. |
ROME. Avant de faire l’apologie de cette exposition bien conçue, on se permettra d’émettre un bémol : couvrant une période de quinze ans (1905-1920), elle ne fait pas comprendre aux visiteurs la diversité des groupes qui sont apparus au début du XXe siècle, que ce soit Die Brüke à Dresde, ou Blaue Reiter à Munich, qui vont finir par se confondre avec l'arrivée de presque tous les membres du premier cercle à Berlin. En outre, nulle relation avec les autres domaines de la création (architecture, littérature, musique, théâtre, puis cinéma) ne permet de situer ces mouvements esthétiques dans l'histoire. Pour le reste, elle est d'une richesse inégalable. On y découvre la radicalité d'Erich Heckell, la singularité de Karl Schmidt-Rottluff, la quintessence bucolique des formes dépouillées d'Otto Mueller, l'humour ambigu de Max Peschtein, la force d'August Macke alliant des contrastes violents et des équilibres formels déroutants, les portraits caricaturaux et pathétiques d'Alexj Jawlensky, la poésie chromatique de Franz Marc et les femmes à la silhouette élancée et aiguë d'Ernst Ludwig Kirchner.
Vers l’abstraction
De grandes œuvres révèlent la vitalité du mouvement comme Nollendorfplatz à Berlin (1912) de Kirchner, Paysage du lac de Tegerne avec homme qui lit et chien (1910) de Macke, Le Taureau (1911) de Marc. L'intérêt de cette manifestation ne s'arrête pas là : de nombreuses gravures, technique privilégiée par quasiment tous les expressionnistes, met en évidence leur maîtrise en ce domaine et la dernière section présente des figures mineures ou marginales (de Paula Modersohn-Becker à Georg Grosz et Otto Dix), qui montrent comment l'expressionnisme s'est renouvelé et a ouvert de nouvelles voies. Enfin, la relation de Vassili Kandinsky et de Gabrielle Münter montre le moment décisif du passage à l'abstraction. La création allemande, qu'on a si peu reconnue, vaut largement ce qui a vu le jour à Paris. Ce parcours si intense le prouve.
| Gérard-Georges Lemaire 22.01.2003 |
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