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Expositions

Hare and Bell, 1988, bronze,
350,5 x 182,9 x 274,3 cm.
© Barry Flanagan, Courtesy
Galerie Waddington, Londres.


The Handshakers, 1995, bronze,
275 x 173,4 x 104,2 cm.


Barry au pays des merveilles.

Barry Flanagan, l’un des maîtres de la sculpture anglaise contemporaine, fait danser ses animaux fabuleux.

NICE. La danse effrénée du lièvre qui attend le spectateur à l’entrée du Musée d'art moderne et d'art contemporain (MAMAC) de Nice, tout droit sorti des contes et fables qui ont émerveillé notre enfance, de Lewis Carroll à Jean de La Fontaine, est la dernière cabriole d’une carrière peu encline à la monotonie. Barry Flanagan, Gallois né en 1941 à Prestatyn, fut tour à tour poète, dessinateur, graveur, céramiste, danseur, sculpteur. Son passage dans l’atelier d’Antony Caro à la Saint Martin’s School of Art de Londres ne semble pas avoir assagi ce tempérament bouillonnant. Après avoir expérimenté, dans les années 1960, tous les matériaux possibles, du tas de sable à la corde de chanvre, dans un langage qui le rapproche de l’arte povera, Flanagan s’essaie à la taille et à la sculpture en bronze en 1973. Les deux dernières décennies mises en lumière par l’exposition sont essentiellement composées d’œuvres en bronze. Chevaux, éléphants, lièvres constituent le bestiaire de cette œuvre irrévérente et inclassable. Matériau noble par excellence, le bronze, parfois doré, est ainsi soumis à tous les caprices de l’artiste, utilisé à contre-emploi : son Thinker on computer (1996) présente en effet le lièvre emblématique sur ce qui semble bien être… le moulage d’un ordinateur.

Lièvres cherchent licorne
Même jeu sur les références et les sujets : le fameux Thinker, apparu dès le début des années 1980, substitue un lièvre à l’homme dans la pose du célèbre Penseur de Rodin. Le thème ne connaît dès lors plus de limites : lièvres pensant ou dansant se voient tour à tour juchés sur quelque cheval (The Thinker, 1985), sur le dos d’un pachyderme ou au sommet d’une tour fameuse (Empire State with Bowler, 1997). L’apparition de créatures mythiques, comme la licorne dans Unicorn and Oak Tree (1991), la mise en scène de danses quasi-chamaniques (Large Mirror Nijinsky, 1992) et l’érection de quelque Large Monument (1996) où trônent des lièvres posent la même question : Flanagan fabrique-t-il des mythes où les démystifie-t-il ? Les dessins, eux, nous laissent devant un maître de la ligne, dont l’éclectisme n’a d’égal que la maîtrise et le caractère incisif du trait, sans tour de prestidigitateur.


 Emmanuelle Amiot
05.02.2003