L’autoportrait qui n’était pas de Van Gogh

OSLO. La conservatrice en chef du musée, Marit Lange, est prête à le reconnaître elle-même : «Il est vrai que nous avons des doutes sur ce tableau. À mes yeux, il est trop lisse, trop soigné. Il sera attentivement examiné par le Musée Van Gogh d’Amsterdam.» Le débat a récemment rebondi, suite aux déclarations de Johannes Rod. Ancien conservateur au musée, historien d’art, il a récemment publié un ouvrage sur les faux au XXe siècle. «Lorsque je travaillais au musée, ce tableau constituait un inépuisable sujet de discussion. J’ai décidé de mener l’enquête. J’ai étudié l’histoire du tableau, sa technique, son style. Chacun de ces trois points soulève des doutes sérieux.» Johannes Rod s’interroge notamment sur le modelé du visage et sur les touches de l’arrière-plan, qui ne sont pas immédiatement reconnaissables comme étant ceux de Van Gogh. Un second portrait a d’ailleurs été découvert, aux rayons X, sous le premier. «Cela n’est pas un argument définitif. On connaît d’autres exemples pour Van Gogh. Une objection plus sérieuse tient au titre de l’œuvre. Lorsqu’elle a été achetée chez un antiquaire à Paris en 1909, elle était intitulée Autoportrait à l’oreille mutilée. Or Van Gogh n’a jamais montré son oreille mutilée, il l’a toujours cachée sur ses autoportraits.» Le fait que le tableau ne soit mentionné dans aucune correspondance du peintre pourrait corroborer les craintes sur son authenticité. ll est actuellement exposé à Trévise dans le cadre d’une rétrospective sur l’impressionnisme à l’époque de Van Gogh. Le commissaire, Marco Goldin, vient d’annoncer qu’il organiserait un colloque le 20 mars, avec les plus grands spécialistes mondiaux, pour tenter de trancher le débat. En attendant, il a modifié l’accrochage. Les trois autoportraits présentés (celui d’Oslo et deux autres, provenant du Musée Van Gogh et de la fondation Bührle, à Zurich) ont été placés côte à côte. Les visiteurs sont appelés à remplir des fiches pour donner leur avis sur la question…