Orgie d’art chez les BorgiaOn les connaît pour leur légende noire, qui mêle népotisme, assassinats, incestes… Mais la sanglante famille avait aussi noué un lien privilégié avec les artistes de l’époque.
| Ambito di Melozzo da Forli (1438-
1494), Portrait du pape Alexandre
VI Borgia, huile sur bois,
40x29 cm, Musée du Vatican.
© Musée du Vatican. |
ROME. L’exposition adopte un parti pris simple mais efficace : les différents membres de la famille bénéficient chacun de leur salle. Les maquettes en bois des caravelles de Christophe Colomb posent le premier jalon chronologique - 1492 - mais les commissaires s’autorisent un flash-back puisque le premier Borgia - ou Borja car ils sont d’origine espagnole - présenté est Alfonso (1378-1458), qui sera pape sous le nom de Calixte III. Vient ensuite le plus décrié de la dynastie, Rodrigo. Devenu pape Alexandre VI, il passe commande à de nombreux artistes, comme Pinturicchio, Titien, Andrea della Robbia ou Benvenuto Cellini. Le pavement des appartements du Castel Sant’Angelo montre le raffinement dont savaient s’entourer ces princes de l’Église. Mais la salle dédiée à Savonarole souligne la tension religieuse de l’époque. De nombreux peintres vivront eux-mêmes une crise personnelle, oscillant entre humanisme décadent et austérité monacale, à l’image de Botticelli, dont on voit une Vierge en trône. Tension religieuse mais également politique : Cesare Borgia, le duc de Valentinois, le plus terrible de la race - il fera assassiner le second mari de sa sœur Lucrèce - est ici abordé par le biais de l’art… de la guerre. En plus de 250 tableaux et objets, et sans faire l’impasse sur leurs travers, l’exposition montre le rôle de mécènes des Borgia. Rome, jusqu'alors à l'écart, devient un grand centre de la Renaissance, ce dont témoignent les nombreux documents (incunables, lettres, manuscrits, médailles, faïences, codex astronomiques). La belle Lucrèce, qui épouse en troisièmes noces Alfonso d'Este, se révèlera elle aussi une grande protectrice des arts à Ferrare. Avant de mourir - malédiction familiale oblige - à 31 ans.
| Gérard-Georges Lemaire 07.02.2003 |
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