Jean Bart, un corsaire au-dessus de tout soupçonDunkerque, sa ville natale, célèbre le tricentenaire de la mort du royal corsaire, devenu icône républicaine.
| Le capitaine Jean Bart
de Dunkerque, gravure
du XVIIIe siècle.
© Archives municipales
de Dunkerque. |
DUNKERQUE. «Ces horizons dunkerquois que Jean Bart servit avec tant de fougue» : lors de l’inauguration, le député-maire de Dunkerque, et presque homonyme Michel Delebarre, maniait le lyrisme pour présenter l’enfant du pays. Né en 1650 à Dunkerque, Jean Bart est mousse à 12 ans. Dix ans plus tard, il devient lieutenant, puis commandant d’un bateau, avant d’entrer dans la marine royale. Dès lors corsaire du roi Louis XIV, il se distingue en prenant de nombreux navires ennemis, ce qui lui vaut d’être anobli. C’est ce parcours exemplaire et plus encore le passage de l’histoire au mythe, que tente de retracer l’exposition. Chacune des cinq salles reflète la vision portée par l’Histoire sur le corsaire, qui finira par devenir un saint protecteur : pendant le premier conflit mondial, on dépose les avions abattus aux pieds de sa statue. Lors des bombardements de 1945, son effigie de pierre est la seule à tenir bon au-dessus des ruines fumantes…
Planche d’Épinal
La Révolution fait de Jean Bart le porte-parole des patriotes dans plus d’un pamphlet, comme le très populaire Père Duchesne de Hébert. Chaque réédition de La Vie de Jean Bart s’augmente d’anecdotes immortalisant un peu plus la légende : des illustrations montrent ainsi le marin attachant son fils au mât du navire, en plein abordage, pour que lui passe l’idée d’avoir peur. On est dans la plus pure logique d’endurcissement prônée par Lycurgue et les siens à Sparte. Au XIXe siècle, le développement des techniques d’impression permet de reproduire à grande échelle l’intrépide marin. L’imagerie d’Epinal en fait l’un de ses héros, à l’égal de Bayard, et l’utilise à des fins d’édification des masses. La grande sculpture commémorative s’en empare également : sa statue par David d’Angers, en 1845, est un modèle de pathos patriotique. Où l’on voit comment l’histoire peut être aisément façonnée, mêlant aux faits réels de pures inventions… Nous sommes ici aux racines du mythe et l’on brûle de percer les mécanismes qui commandent cette «panthéonisation». Mais l’on demeure un peu sur sur sa faim devant cette succession de portraits de Jean Bart, présentés sans véritable fil conducteur. Il reste toujours la possibilité de se reporter au catalogue, très instructif…
| Nolwenn Chauvin 19.02.2003 |
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