Grande-Bretagne / États-Unis : deux points à zéroDans un marché mondial en baisse généralisée, la Grande-Bretagne partage équitablement avec la France les 4% de parts de marché perdus par les États-Unis en 2002. S'agit-il d'une nouvelle « Entente cordiale » ou d'une affaire de famille anglo-saxonne ?
Dans chaque cas, et c'est ce qui leur donne une signification particulière, les données de 2002 ne font que confirmer une tendance profonde amorcée depuis plusieurs années. Le chiffre d'affaires du fine art est en progression régulière en France depuis 1996, celui des États-Unis baisse depuis 1997. Quant à la Grande-Bretagne, elle montre une belle stabilité depuis 1999. Alors que le volume d'affaires mondial a baissé de 7 % l'an dernier et celui des États-Unis de 13 %, le marché anglais est passé de 475 à 472 millions £, soit une perte de 0,6 %. Le ralentissement général aidant, sa part du marché est passée de de 26,8 à 28,8 %.
La Bourse baisse, les achats d'art augmentent
La comparaison entre l'évolution des indices généraux des prix du fine art et de la Bourse est une fois de plus particulièrement intéressante. La Bourse de Londres a, comme celle de Paris, enregistré un mouvement de baisse nettement supérieur à celui des États-Unis. 100 € investis dans une valeur de l'indice F.T.S.E 100 en 2000 n'en valent plus que 58,3 fin 2002 (mais 47,5 en France et 80,8 aux États-Unis), contre 107 s'ils avaient été investis en fine art sur la même période. Et si l'on rapproche les courbes correspondantes avec celles que nous avons publiées dans nos deux précédents numéros, on constate une grande similitude entre les évolutions françaises et anglaises. C'est dans ces deux pays où la Bourse chute le plus, et en fonction de cette chute, que les achats d'art progressent - en France - ou se maintiennent - en Grande-Bretagne. Aux États-Unis, où la baisse est plus modérée, les achats baissent aussi d'une façon quasi-parallèle. L'investissement en art est d'autant plus tentant que les placements boursiers sont décevants.
L'Angleterre est une île
On n'en concluera pas que la « vieille Europe » est en passe de dominer le marché. Les Îles britanniques peuvent s'amarrer à tous les continents et les pays anglo-saxons représentent encore plus de 72 % du marché des ventes d'art aux enchères. La prédominance des deux côtés de l'Atlantique des deux mêmes grands auctionneers n'est pas faite pour changer cet état de choses. La Grande-Bretagne grignote le marché américain, mais le bloc anglo-saxon reste intact, et les spécificités des deux pays sont voisines. La répartition des ventes anglaises par tranche de prix est plus proche de celle des États-Unis que du reste du monde, avec une forte proportion de lots d'un prix élevé, et des records d'enchères d'un niveau égal. Les domaines d'intervention sont les mêmes, sauf une plus grande place faite par Londres au dessin et à l'estampe. Le nombre de lots vendus a moins baissé qu'aux États-Unis - passant quand même cette année de 41 383 à 27 338 - sans affecter le chiffre d'affaires global. Plus préoccupant, en deux ans, le nombre de ventes cataloguées a diminué de 25 %, passant de 3 410 à 2 576. C’est, bien sûr, nettement moins qu'aux États-Unis, et grâce à ses propres ressources et dans un contexte économique différent, le marché anglais a mieux résisté, mais les vases communiquent. On comprend d'autant mieux le combat britannique pour échapper aux carcans économiques et fiscaux européens qui ruinent la compétitivité.
| Jacques Dodeman 06.03.2003 |
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