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Expositions

Tunga, Eixos Exogenos, 1986, bois et métal, 215 cm © Photo Wilton Montenegro


Tunga : la sculpture est un jeu

L'artiste brésilien, adepte des pièces monumentales, occupe depuis quelques jours les salles du Jeu de Paume.

On ne se bouscule pas aux portillons du Jeu de Paume ces jours-ci. Les noms mystérieux et exotiques des artistes exposés, Mira Schendel et Tunga, sont largement inconnus du public. La fabuleuse chevelure en laiton, la tresse démesurée tout en plomb, les reptiles antédiluviens en cuivre semblent faire revivre les exploits de Roland Furieux, ici-même, au cœur du Paris contemporain. Faire du spectacle avec de la sculpture est une chose qui sort de l'ordinaire, une tâche sublime qui tient du merveilleux. Dans ce haut lieu d'exposition qui vient à peine d' évacuer les sobres et monumentales sculptures de Chillida, Tunga, jeune sculpteur brésilien de 48 ans, fait descendre la sculpture de son socle sacré en la faisant basculer du cultivé au populaire, de conceptuel à l'évocatoire. Comme un trésor spectaculaire, des vases en verre soufflé, perles du cristal, boules de billard, marmites, cloches sont assemblés dans un tout extravagant qui occupe la seconde salle à l'étage.

Suspendus ensemble par des filets de pêche, ces objets hétéroclites semblent avoir été trempés dans une même mixture rouge et laissés à égoutter au dessus du sol. Belle et inquiétante, cette pièce semble tenir à la fois de la magie et de la fable. En verre soufflé, transparentes, organisées sur le sol comme des modèles à peindre, les natures mortes de Tunga sont si fascinantes dans leurs précieuses et fragiles enveloppes, qu'elles nous donnent l'impression d'être parmi nous, comme de éléphants dans une boutique de porcelaine.

Au rez-de-chaussée, l'ouvre de l'artiste suisse emigrée au Brésil, Mira Schendel (1919-1988), intrigue par son intimisme. Lorsqu'elle peint ses natures mortes, tout comme l'équilibriste qui essaye la corde avant de s'y aventurer, sa main semble douter de la teneur de la ligne sur la toile ainsi que de la composition. Ses installations transparentes sur du papier de riz sont suspendues par des fils en plastique de sorte que l'espace de la galerie se réduit au monde créé par l'artiste. On pense aux écritures savantes de Twombly, aux calligraphies chinoises adoptées par la sensibilité subjective de l'artiste, poétisées à outrance.


 Ileana Cornéa
17.10.2001