L’esprit des chosesCe court traité des sensations est d'abord une autobiographie voilée et, plus encore, l'histoire d'une relation esthétique qui prend d'emblée une dimension placé sous le signe d'Éros.
Jean Clair est devenu le mauvais génie de la modernité. Il a su concilier des contradictions flagrantes (par exemple l'amour qu'il porte à la fois à Duchamp et à Music ou à Safran) que bon nombre de ses contemporains ne lui pardonnent guère. Ce digne disciple de Diderot (le goût n'a de fondement que dans la subjectivité) dévoile ses goûts, ses engouements et dépeint l'univers qu'il a fait sien par le truchement des objets qui appartiennent à son imaginaire. En sorte qu'il déploie les choses (qu'elles soient artistiques ou non) qui sont entrées dans son cabinet de curiosités. Mais s'il est collectionneur dans l'âme, ce n'est pas la possession matérielle qui l'intéresse, mais les relations secrètes qu'elles entretiennent les unes avec les autres. Cette apologie ponctue l'ouvrage, le conduisant des musées d'anatomie aux musées de cire, de la Madone de la Parturition aux huîtres perlières en Chine. Ce périple où tout se délivre à la vue, tout en s'y dérobant, est le livre secret d'une passion qui se joue dans cette zone de frontière entre l'art de l'amour et l'amour de l'art.
| Gérard-Georges Lemaire 15.03.2003 |
|