L’art contemporain est un jeu de pisteLe Musée d’art contemporain de Lyon, qui n’ouvrait qu’à l’occasion d’expositions temporaires, présente désormais sa collection en permanence. En suivant une approche thématique originale.
| Ilya Kabakov, le navire © Musée d'Art
contemporain de Lyon |
LYON. L'art contemporain est une nébuleuse éclatée, décentrée, protéiforme. Impossible de le réduire à une unité ou à une pratique quelconque. Par conséquent, la constitution d'une collection est devenue un véritable casse-tête pour les institutions. Depuis 1984, le Musée d'art contemporain de Lyon, soucieux d'éviter toute redondance avec ses voisins de Grenoble et Saint-Étienne, a choisi d'opérer des coupes transversales dans la création contemporaine. Les pièces conservées témoignent de l'activité d'artistes souvent vivants et sont regroupées en grands ensembles thématiques, et non selon une logique historique. «L'Art Mol et Raide», titre en hommage à Erik Dietman, décédé l’an dernier, rassemble ainsi, avant un renouvellement prévu pour le 25 avril, une cinquantaine d'œuvres emblématiques de la collection.
La Joconde dans l’escalier
C'est la Joconde (seau, serpillière et balai) de Robert Filliou qui vous accueille au seuil de l'exposition. Place, donc, aux enfants de Duchamp de la seconde moitié du XXe siècle à nos jours. Filliou et le mouvement Fluxus sont d'ailleurs à l'honneur au premier étage. Ceux qui désiraient abolir les frontières entre l'art et la vie se retrouvent paradoxalement dans un musée, voire derrière des vitrines ! Le bric-à-brac constitué d'archives, de petits objets humoristiques et de photographies de performances apparaît bien dénué de vie et n'intéressera qu'à titre documentaire. Plus captivants : Passageway de Robert Morris, la réplique d'Étant donnés de Richard Baquié ou Le Navire d'Ilya Kabakov, véritable mausolée témoignant de l'URSS stalinienne. Au deuxième étage est présenté un ensemble de vidéos où les thématiques du corps et de la sexualité s'imposent (Vito Acconci, Bruce Nauman). Malheureusement, leur concentration dans un espace restreint confine à la cacophonie, et donne bien vite la migraine. On retiendra plutôt les installations sidérantes de Bill Viola ou du collectif Dumb Type, et les deux salles largement consacrées aux expérimentations spatiales de Robert Morris. L'exposition porte finalement bien son nom, passant du mol au raide, de l'anecdotique au «classique», du conceptuel au sensoriel. Les mises en perspective thématiques ne sont pas toujours d'une lecture facile. Le spectateur devra fouiller, questionner, s'armer de patience, afin d'être éclairé et de découvrir quelques perles rares.
| Jean-Emmanuel Denave 26.03.2003 |
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