Un thé chez le Docteur GachetLa maison de vacances de l’ami des impressionnistes ouvre au public le 30 mars. La visite provoque un flot d’émotions…
| © Catherine Brossais, conseil
général du Val d'Oise |
AUVERS-SUR-OISE. «Nous ne sommes pas dans un musée mais dans une maison. Qui a eu une vie», prévient Annick Couffy, chargée par le conseil général du Val d’Oise du chantier depuis 1996 ; une remise en état réussie, ouvrant au public un endroit poétique. Vingt-cinq visiteurs, au maximum, y pénétreront à la fois. La maison ? Deux petits étages, restés en l’état grâce à la délicatesse des derniers propriétaires, qui l’avaient rachetée, à la mort du fils Gachet, en 1962 ; lequel avait déjà entretenu la mythologie de son père, étiquetant, ici, la table sur laquelle il s’était accoudé en posant pour Van Gogh, là, l’endroit où Cézanne avait fait percer une fenêtre, afin d’améliorer la lumière du grenier-atelier. Meubles et objets disparus ont été remplacés par la projection électrique de leurs silhouettes, inspirées par des photographies d’époque.
Garder l’âme du lieu
Ce théâtre d’ombres, imaginé par le jeune scénographe Adrien Gardère, trouve un écho au second étage : certains papiers peints d’époque, restaurés, portent la marque des tableaux anciennement suspendus. Les visiteurs, comme Annick Couffy, attrapent une chair de poule délicieuse... «Ne pas troubler l’âme du lieu, ni ses fantômes», dit-elle, avant de dévoiler le cabinet des dessins. Dans chaque tiroir, les fusains et les crayons sont signés Docteur Gachet. Le jardin est aussi réussi. Inspiré par deux toiles que Van Gogh en fit, la plantation a été enrichie de fleurs à la mode au XIXe siècle et d’herbes médicinales d’alors. Gachet s’intéressait à l’homéopathie, sa thèse consacrée à la mélancolie, jamais publiée, en atteste. Il y a aussi beaucoup de digitales, qu’il utilisait, de pavots, que son fils adorait, et de marguerites, en souvenir du prénom de sa fille. Au fond, des carrières de pierre hors service : là encore, l’émotion demeure. On imagine les séances de lectures qui s’y déroulaient, les soirs d’été, à la chandelle. Pissarro, Cézanne ou Guillaumin ont pris là le temps de refaire le monde de la peinture.
| Françoise Monnin 29.03.2003 |
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