La Douma suspend les restitutionsLe Parlement russe refuse de rendre à l’Allemagne une collection de près de quatre cents dessins, pris comme butin de guerre.
MOSCOU. Un milliard et demi de dollars ? Ou seulement vingt millions ? En ce moment, les évaluations de la collection Baldin sont très politiques. Pour la chambre basse du Parlement, cet ensemble de trois cents soixante dessins signés, entre autres, par Dürer, Raphaël, Titien, Rubens, Rembrandt, Delacroix et Van Gogh, est un trésor inestimable. Il ne peut être abandonné sans compensation financière. Le vote de la Douma, le 12 mars, ne laisse planer aucun doute : trois cent quarante-sept députés - contre un seul - ont voté l’appel au président Poutine lui demandant de s’opposer à ce retour. En revanche, pour le ministre de la Culture, Mikhaïl Chvydkoï, le rapprochement avec l’Allemagne impose certaines concessions comme le retour à son musée d’origine, la Kunsthalle de Brême, de ce fonds. La passe d’armes a pris un tour plus tendu le 24 mars lorsque le parquet général a fait savoir au ministre de la Cuture qu’il s’exposerait à des poursuites pénales s’il persistait dans ses intentions. De fait, la collection qui devait être montrée à Brême dès le début du mois d’avril est actuellement exposée au Musée de l’architecture de Moscou. C’est son ancien directeur, Victor Baldin, auparavant officier dans l’Armée rouge, qui avait rapporté d’Allemagne, dans une valise, ces précieux papiers. Leur existence a été tenue secrète jusqu’à sa mort, en 1991 mais Victor Baldin avait indiqué dans son testament qu’il souhaitait qu’ils soient rendus à leur propriétaire légitime. Les négociations semblaient devoir aboutir prochainement. Elles prévoyaient, en échange, le dépôt permanent d’une vingtaine de ces œuvres, dont un tableau de Goya, au Musée de l’Ermitage. La Douma, de son côté, demande l’application stricte d’une loi de 1998, qui rend quasiment impossible les restitutions. Les vents nationalistes, qui soufflent fort en ce moment, touchent aussi le monde de l’art.
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