Les daguerréotypes sortent de l’oubliDepuis l’ouverture de sa nouvelle galerie de photographie, le Musée d’Orsay s’investit plus que jamais dans l’exploration de ce procédé.
| Anonyme, Nu
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Compagny Collection |
PARIS. Présenté à l’Académie des sciences de Paris le 7 janvier 1839, par François Arago, la nouvelle technique de reproduction mécanique et chimique des images prend le nom de son inventeur : Jacques Daguerre (1787-1851). Ces plaques de cuivre recouvertes d’une fine couche d’argent étaient exposées à la lumière durant une quinzaine de minutes avant d’être développées par des vapeurs de mercure dans l’obscurité. La fragilité de ces pièces uniques explique les précautions prises lors de leur exposition. Bien que le daguerréotype soit à l’origine de la photographie, il a longtemps été considéré comme une « branche morte », un premier essai vite effacé par l’évolution technique. C’est pour redonner la place qui lui est due à cette invention que le Musée d’Orsay propose un voyage thématique dans l’univers de la chambre obscure à travers plus de trois cents plaques de cuivre et nombreux documents d’époque. Grâce à des murs colorés guidant le visiteur à travers les différentes sections, à des loupes permettant d’apprécier les détails des natures mortes de coquillages ou encore à un éclairage spécifique atténuant les reflets argentés de chaque oeuvre, l’exposition est aussi bien accessible au grand public qu’aux chercheurs. Aux figures classiques se juxtaposent des travaux plus originaux comme le Portrait de Jean-Baptiste Meurice, roi des Incas de Valenciennes, colorié à la main, ou des caricatures d’Honoré Daumier révélant le regard de ses contemporains sur cette première reproduction du réel. Les champs d’application sont multiples : vues de Paris et de ses monuments disparus comme le Palais des Tuileries, souvenirs de voyages à l’étranger ou mises en scène de nus érotiques qui ont pu influencer Gustave Courbet pour Les Deux amies. Car les artistes aussi ont utilisé ce procédé. Eugène Delacroix se fait « daguerréotyper », pour la première fois, par son cousin Léon Riesner tandis que Lisa Bonheur commande à Bisson un portait d’un « bœuf gras » primé à Versailles en 1850. C’est à la demande de sa seconde femme qu’Ingres se voit dans l’obligation de faire disparaitre une toile représentant sa première épouse très largement dénudée. Avant de la détruire, il demande à Désiré François Millet de le fixer sur une plaque de cuivre … C’est aujourd’hui le seul témoignage qu’il nous reste de cette œuvre.
| Stéphanie Magalhaes 26.05.2003 |
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