Une visiteuse devant l’autoportrait de Matisse, encre sur papier, 1944, 40x26 cm © Françoise Monnin
Trigano et César chez les Nahon dans les années 70
© Galerie Trigano
| | Patrice Trigano : c'est Matisse qui souffle les bougiesLe galeriste parisien fête son trentième anniversaire avec des dessins de Matisse.
« Ce qui est accroché aux murs vaut plus cher que tous les murs ensemble », dit un visiteur, content de lui, flûte de champagne à la main, en descendant l'escalier du 4 bis de la rue des Beaux-Arts. Il est vrai que dix-sept dessins de Matisse d'un coup, ça n'est pas rien ! Même si ce sont des œuvres tardives (essentiellement des années 40) ; et même si, de prime abord, leur simplicité déroute. Rien que quelques traits de mine ou de plume sur de grands fonds vierges... des traits légers comme des pattes d'oiseaux, fermes comme des coups de ciseaux ; juste des virgules, transformées en nez mutins, en mentons volontaires, en chevelures souples. C'est pétillant, musical, incroyablement moderne, lorsqu'on songe que le maître (1869-1954) allait alors avoir quatre-vingts ans et qu'il dessinait la plupart du temps couché. « Depuis un an j'ai fait un effort énorme en dessin. Je dis effort c'est une erreur, car ce qui est venu c'est une floraison après cinquante ans d'effort », écrivait-il alors à son fils.
Autre floraison, à l'occasion de laquelle cette exposition est inaugurée : celle de la carrière du propriétaire de la galerie, Patrice Trigano. Accueillant les premiers visiteurs de l'exposition Matisse, il se tient bien raide, sur le perron, en costume clair. « Bon anniversaire » répètent la plupart des nouveaux arrivants, avant de se noyer dans la foule agglutinée devant le buffet. Il y a tout juste trente ans, Patrice Trigano, ancien élève de l'Ecole du Louvre et des hautes Etudes Pratiques de la Sorbonne, devenu en 1968 stagiaire chez des commissaires priseurs, collectionnait déjà l'Art Minimal. Carl André, Sol Lewitt, Buren, etc.. C'est alors que Maurice Rheims lui confia le soin d'organiser une vente aux enchères de peintures contemporaines.
Après avoir créé, en 1973, avec Marianne et Pierre Nahon, la célèbre galerie Beaubourg (à ne pas confondre avec le Centre Pompidou), en 1983 il inaugura son propre espace, pour y vendre quelques sculptures et beaucoup de peintures. Essentiellement des valeurs sûres, comme Masson, Michaux ou
Hélion. Choisir Matisse à présent, voilà une manière joyeuse de le paraphraser : au poète Aragon, venu le voir à Nice, le vieux maître ne déclara-t-il pas « J'ai travaillé des années pour qu'on dise, Trigano (Matisse) ce n'est que ça » ?
| Françoise Monnin 06.10.2001 |
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