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Expositions

Parcours Fleischer

Le Réverbère présente un florilège de l’œuvre d’Alain Fleischer. L’accrochage original nous plonge au cœur d’un univers spéculatif fascinant.


Alain Fleischer,
Happy Days with Vélasquez, 1986
© Galerie le Réverbère
LYON. Alain Fleischer écrit, installe, filme, photographie. Sa production est stupéfiante. D’une identité artistique à l’autre, il tresse une œuvre polymorphe, ample, majeure. Photographe, Fleischer n’enregistre pas le réel ni ne lui dérobe ses images, mais il fabrique du visible, ajoute du visible au visible, le démultiplie. L’instant décisif, cher à Cartier-Bresson, se situe chez lui très en amont du déclic fatidique : chaque photographie est le fruit d’une longue réflexion et d’une mise en scène minutieuse. « Les Voyages Parallèles sont certainement mes images les plus complexes » nous confie l’artiste. Train miniature en mouvement, reflets et images projetées s’y entremêlent au sein d’une composition photographique où l’espace et le temps se dilatent et se dédoublent. Ces Voyages Parallèles (1991, 10 700 €) ouvrent judicieusement l’exposition : entre ombre et lumière, être et paraître, jeux théoriques et libre sensualité, le spectateur est invité à un voyage parmi un monde tissé d’images. Celles-ci semblent flotter doucement à l’intérieur de la galerie, séduisant d’abord notre sensibilité avant d’éveiller notre curiosité intellectuelle. Pour cette rétrospective, qui couvre la période 1968-2003, les galeristes ont pris le parti de bouleverser quelque peu les séries très cloisonnées du photographe ainsi que leur chronologie, afin de les faire dialoguer entre elles par le biais d’une prosodie plastique ou thématique. Les nus d’Ingres, de Goya ou de Renoir se reflétant sur un miroir traîné par un petit jouet (Happy Days, 1986) côtoient de beaux visages féminins projetés sur des rochers au milieu d’une plaine ou d’un océan (La Nuit des Visages, 1995, 9200 €). A l’étage, le corps dans tous ses états est à l’honneur. Celui, symbolique et tourmenté, des Paysages de Sol (1968, 2750 €) fait face aux reflets d’images pornographiques de la série Hard Days, pendant « cru » des Happy Days rarement présentée. Deux exemplaires de la série Fenêtre sur cour et quelques « portraits » noir et blanc (reflets de visages sur des objets du quotidien tels qu’un couteau ou une bouilloire) terminent l’exposition. Celle-ci réussit à donner bien plus qu’un simple avant-goût de la rétrospective que la Maison Européenne de la Photographie consacrera à Fleischer en octobre prochain.


 Jean-Emmanuel Denave
30.06.2003