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Patrimoine

La Tamise parle français

De Southwark à Vauxhall, la scène londonienne n’en finit pas de se renouveler. Cet été, elle célèbre la création française.


Carole Benzaken, Market Street, 2002
© Galerie Anne Faggionato
LONDRES. Depuis l’ouverture de la Tate Modern en mai 2000, l’ancien quartier industriel de la rive sud de la Tamise s’est résolument tourné vers l’art contemporain. En avril dernier, c’est au cours d’une soirée de vernissage pharaonique - 21 000 personnes et un happening de 200 figurants nus – que s’ouvrait la galerie de Charles Saatchi. Installée en bordure du fleuve, dans les grands bâtiments néoclassiques du County Hall, elle est d’ores et déjà investie par la Mini à poids de Damien Hirst, l’artiste vedette des Young British Artists (YBA). De manière souvent plus discrètes, les nouvelles galeries se sont multipliées dans ce quartier de Southwark. Le f a Project, en grande partie consacré à la vidéo, s’est ainsi installé dans un ancien entrepôt de torréfaction, à quelques minutes de la Tate. On y verra pendant l’été Suspendu, installation photo vidéo due au trio Leblon, Menini et Montaron, programmée dans le cadre de « Made in Paris », manifestation conçue comme un pont entre la création photo et vidéo françaises et une vingtaine de galeries londoniennes. Plus au sud, le quartier populaire de Vauxhall, ravagé lors du Blitz et dont les rues sont aujourd’hui bordées de HLM et d’anciens entrepôts, bénéficie depuis peu du dynamisme de Bankside. Le galeriste David Gill y occupe un grand loft, ordinairement consacré au design, mais investi pour « Made in Paris » par un florilège des collections de la Maison européenne de la photographie. Nul doute que l’expérience incitera le maître des lieux à se tourner à nouveau vers ce médium… A quelques encâblures s’élèvent des gazomètres, ces étonnantes réserves de gaz à niveau variable installées dans des structures métalliques circulaires. L’un d’entre eux - rebaptisé Gasworks Gallery - a été réhabilité en résidences pour artistes et lieu d’expositions temporaires, où l’on découvrira « Don’t fight it ! », exposition vidéo collective. L’essor du Sud londonien n’a rien ôté du dynamisme de l’East End, quartier pluri-ethnique où galeries, restaurants et librairies « branchées » se bousculent depuis une dizaine d’années. De Whitechapel à Shoreditch (MW project) et Chisenhale (Chisenhale Gallery), quartiers défavorisés aujourd’hui colonisés par les artistes, les galeries (Hammer Sidi, Vilma Gold, White Cube) côtoient les lieux institutionnels. L’inIVA, établi par l’Arts Council à proximité du Cargo, la scène rock alternative, a ainsi fait le choix de la promotion d’artistes issus des minorités ethniques. Quelques rues plus loin, The Center of Attention, collectif d’artistes auto-financé, soutient la création émergente, en prêtant ses cimaises à de jeunes artistes internationaux.
Le tea-time sera l’occasion d’un retour dans les quartiers plus convenus de Soho et Mayfair, vers le Sketch, restaurant au design avant-gardiste doté d’une galerie vidéo. Enfin, on ne manquera pas l’exposition de peintures et de vidéos récentes de la Française Carole Benzaken chez Anne Faggionato, ainsi que la projection de Chantal Ackerman (Avec Sonia Wieder- Atherton) à la Frith Street Gallery, remarquable dialogue entre une violoncelliste et son instrument, filmé comme le déroulé d’une partition musicale.


 Sophie Flouquet
15.07.2003