C'est beau une piscine la nuitA Lyon, un quatuor emmené par Christian Boltanski investit de façon convaincante le dédale d'un établissement sportif.
| Christian Boltanski, Happy Hours
© Denis Mathieu, Biennales de Lyon |
LYON. Les enfants se croiront dans les souterrains de Poudlard. Pour les adultes, l'atmosphère se situera au croisement de Belphagor et de Kanal, le film tragique de Wajda. Difficile de reconnaître de banals vestiaires dans ces boyaux balayés de puissants projecteurs, où flotte une brume de matin mouillé. Dispersés dans les cabines, des instrumentistes - une flûtiste, un hautboïste, un violoncelliste, un guitariste - relâchent quelques rares notes, qui recomposent une symphonie de Mahler à l'usage d'un monde cotonneux. Le jet continu de toutes les douches assure un fond sonore déroutant.
Cherchez la piscine
La performance est séduisante dans le sens où elle transfigure un lieu, le rendant méconnaissable, lui donnant une épaisseur mystérieuse. Par l'effet d'éléments simples - la musique et la lumière essentiellement - on ne se trouve plus dans l'immense piscine du Rhône mais dans un labyrinthe, dans un système intestinal plein d'anfractuosités. Dans la dernière pièce, on lit bien sur le panneau d'affichage un «Protocole de nettoyage de la pisicine» qui pourrait nous faire sortir du monde des rêves. Mais, dans la pénombre illuminée par le néon «Happy Hours - Demain», le catalogue des instruments - autolaveuse, balai alimentaire ou tuyau d'arrosage diamètre 9 - prend plutôt des allures de cadavre exquis surréaliste. Et la piscine, à propos ? Vous la découvrirez en sortant, paisible, sous la lumière des ponts. Jamais elle ne nous aura semblé aussi belle.
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