| Sophie Aurand,
administratrice
générale de la RMN
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Sophie Aurand : «Equilibrer les comptes de la RMN est une priorité»Le principe mutualiste qui régissait le fonctionnement de la Réunion des musées nationaux est écorné. Son administratrice explique comment l'institution, privée des recettes du Louvre, va s'adapter à la nouvelle donne.
Comment résumer l'année 2003 en termes de chiffres d'affaires ?
Sophie Aurand.C'est une année très contrastée. Le chiffre d'affaires commercial, qui était de 80 millions d'euros en 2002, a baissé de 15% en 2003 pour s'établir à 70 millions d'euros. Cette baisse reflète celle de la fréquentation des musées nationaux : moins 10% en raison de la guerre en Irak et de l'épidémie de SARS. Elle est amplifiée par le fait que c'est le public le plus fortuné, celui qui achète davantage de catalogues et de produits dérivés, c'est-à-dire les touristes américains ou japonais, qui connaît la plus forte contraction.
Vous avez annoncé que la RMN allait se recentrer sur ses métiers de base. Quelles activités allez-vous abandonner ?
S. A. D'abord la vente par correspondance, qui est déficitaire depuis des années. Dans la VPC, les marges sont très faibles et même pour les atteindre, il faut des volumes de ventes très importants. Ensuite, nous allons fermer l'Unité partenaire, qui assurait les relations presse pour certains musées de région (non nationaux) qui en faisaient la demande. Dans la période actuelle, nous souhaitons clairement favoriser les actions en faveur des musées nationaux, ce qui ne veut pas dire que nous abandonnons pas les musées de région. Nous souhaitons entrer dans une démarche plus globale, et réaliser avec eux de véritables coproductions. C'est par exemple le cas pour l'exposition Rubens à Lille. La filiale italienne, RMN-I, va également fermer. Nous voulons mettre fin à l'éparpillement des activités. Ces transformations se feront sans licenciement, avec un reclassement des salariés.
Quand estimez-vous retourner à l'équilibre financier ?
S. A. Pour moi, l'équilibre financier des comptes de la RMN est une priorité à atteindre au plus tôt. Cet équilibre implique d'abord une rentabilité retrouvée pour les activités éditoriales et commerciales. Il suppose aussi que nos activités de service public soient garanties par un financement de l'Etat. Le déficit d'exploitation a été de 11 millions d'euros en 2001, de 5 millions d'euros en 2002 et il sera inférieur en 2003 grâce à des économies supérieures à 10 millions d'euros. L'Etat, conscient de l'importance du rôle joué par la RMN, lui a réitéré son soutien avec une subvention de 15,6 millions d'euros pour 2004. Cette subvention se décompose ainsi : 11,4 millions d'euros correspondent au «décroisement des financements», c'est-à-dire au fait que les musées du Louvre, d'Orsay, du château de Versailles et des Arts asiatiques-Guimet conservent désormais les droits d'entrée perçus, qu'ils nous reversaient auparavant en totalité ou en partie ; 4,2 millions d'euros constituent un complément et marquent le soutien de l'Etat aux activités de service public de l'institution.
L'édition de catalogues raisonnés ne risque-t-elle pas de pâtir de cette politique d'économies ?
S. A. Pas du tout. Elle fait partie de la mission de service public de la RMN. Nous continuerons donc de publier des catalogues scientifiques an rythme de dix à quinze par an.
Et la programmation aux Galeries du Grand Palais ?
S. A. Non plus. En 2005, nous en serons même le seul exploitant, une mission que nous partageons aujourd'hui avec les services de l'Etat. Les agents de surveillance vont être titularisé dans les corps de l'Etat et ils seront remplacés par du personnel en sous-traitance, comme cela se fait dans de nombreux musées à travers le monde. Nous avons eu trois expositions très fréquentées en 2003 : «Chagall connu et inconnu», «Vuillard» et «Gauguin-Tahiti». Avec ces trois expositions, les Galeries nationales du Grand Palais ont accueilli plus de 1,2 million de visiteurs, un chiffre qui n'avait pas été atteint depuis de nombreuses années. Nous aurons quatre expositions en 2004 : «Montagnes célestes» (pour l'Année de la Chine), «La Grande Parade, portait de l'artiste en clown», montée par Jean Clair, «Turner-Whistler-Monet», une coproduction avec le musée d'Ottawa et la Tate Gallery, et «Images du monde flottant» sur l'estampe japonaise. En 2005, je peux déjà vous annoncer une grande exposition sur les Indiens du Brésil dans le cadre de l'année brésilienne, puis «Klimt, Kokoschka, Schiele, Moser», dont le commissaire sera Serge Lemoine, du Musée d'Orsay, et «Mélancolie, Génie et folie en Occident», également conçue par Jean Clair.
(Propos recueillis par Rafael Pic)
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