Accueil > Le Quotidien des Arts > Le Salon du dessin s’introduit à la Bourse

Marché

Le Salon du dessin s'introduit à la Bourse

La manifestation abandonne les salons Hoche pour le palais Brongniart. Ce nouveau cadre affectera-t-il son caractère intimiste ?


Joris (Georg) Hoefnagel (1542-1601)
Vanité (Nature morte avec crâne, fruits,
fleurs et insectes)
, gouache et aquarelle
sur parchemin, 169 x 115 mm
PARIS. On change de quartier mais l'on reste en famille… Si le Salon du dessin, à sa treizième édition, abandonne les abords de l'Etoile pour l'ancienne Bourse des valeurs, ce n'est pas pour multiplier les stands mais pour accueillir plus commodément un public qui a montré sa fidélité et qui atteint désormais les 10 000 visiteurs. Parmi les exposants figurent les neuf membres de la Société du dessin (Hervé Aaron, Jean-François Baroni, De Bayser, Brame et Lorenceau, Chantal Kiener, Prouté, Scala, Talabardon et Gautier, Terrades) et les vingt et une galeries qu'ils ont invitées. Chez ces dernières, autant étrangères que françaises, on note deux nouveaux entrants : la Présidence et Pandora.


Simon Albert Bussy (1870 -1954),
Couple de perruches vertes,
pastel, 235 x 165 mm
Qui se souvient du fusain ?
Le choix est, comme d'habitude, vaste en termes de techniques, de sujets et d'époques. Les grands noms du XXe siècle sont là avec une encre de Chine de Picasso chez Bérès, une lumineuse aquarelle de Derain (La Musique) chez Dickinson ou encore une Tête de Tahitienne de Gauguin chez Jean-Luc Baroni. La Renaissance et le Grand Siècle ne font pas défaut : au hasard des allées, on voit un paysage hivernal de Paul Bril (Agnew's), un autre du Lorrain (Arturo Cuéllar), des animaux d'Oudry (le Combat de coqs chez Artémis) ou une Vanité explicite de la fin du XVIe siècle par Hoefnagel (Thomas Le Claire). Parmi les techniques autrefois florissantes et fort tombées en désuétude, voici le fusain, seul capable de donner ces noirs expressifs, bien gras, ou ces délicats frottis. Il a pour interprètes François Bonvin, qui brosse un Homme assis jouant de la mandoline sur un fond très charbonneux (chez le new-yorkais Brady), Georges Lemmen avec Sous la lampe à l'atmosphère encore plus crépusculaire (à 25 000 euros chez Patrick Derom, spécialiste du symbolisme belge) ou Adolph von Menzel, qui s'en sert pour définir des portraits aux contrastes bien balancés : Homme au fédora chez Arnoldi-Livie, que l'on pourra comparer à l'Etude d'un jeune Italien chez Tan Buzl.

L'heure des redécouvertes
Le Salon du dessin est un lieu idéal pour revoir des artistes méconnus : il peut s'agir soit de purs spécialistes du dessin, soit de peintres à la renommée très discrète comme Raoul du Gardier avec sa Baignade en mer (Philippe Heim). Du Boivin précédemment cité, on goûtera un tableau très «troubadour» chez Scala, dont le titre dit tout : Orpheline convoquée par le mère supérieure. Il côtoie une œuvre qui semble assez exactement son antithèse : La Construction du Roxy Theatre à New York par Boutet de Monvel, dans un cadre très Art déco. Ces contrastes font tout le charme du Salon du dessin. Au stand voisin, chez Kate Rothschild, même traitement avec des feuilles du XVIIIe siècle en compagnie de ces trois Projets de salons par Delavivier, un décorateur des années trente (12 000 euros l'ensemble). Et si, à la différence de la Biennale des antiquaires, on peut encore faire des acquisitions significatives pour des montants «abordables» - témoin cette Nature morte au lapin de Constantin d'Aix (1756-1844) à 2500 euros à la galerie Terrades - il est désormais difficile de négocier sous la barre des 1000 euros. Dessin : valeur en hausse…


 Rafael Pic
17.03.2004