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Marché

Ray-Coburn, un duel d'avant-garde

Un rayogramme de Man Ray contre un vortographe de Coburn : ce sont les têtes d'affiche des ventes à New York.


Man Ray, Rayogramme, 1926.
Estimation : 150 000 à 250 000 $.
Christie's New York, 27 avril 2004.
NEW YORK. On connaît bien les rayogrammes, que Man Ray (1890-1976) intitula modestement à son image. On connaît moins bien les vortographes d'Alvin Langdon Coburn (1882-1966), qui ont pourtant le mérite de l'antériorité. Les rayogrammes ont été découverts par inadvertance en 1921 : Man Ray ayant laissé des objets sur du papier sensible, un jet de lumière les avait imprimés en blanc sur fond noir. Le vortographe est au contraire une créature mûrement réfléchie. Le jeune prodige Coburn, ami de Stiglitz et interprète du pictorialisme, voulut graver sur une même plaque les états successifs d'un objet en mouvement. «Pourquoi la perspective ne pourrait-elle pas être étudiée depuis des points de vue jusqu'alors négligés ?» écrivait-il en 1916. On sent évidemment une analogie avec les recherches cubistes et futuristes. Pour ce faire, Coburn, qui est lié aux membres du groupe vorticiste, notamment l'écrivain Wyndham Lewis, imagine un vortographe, sorte de prisme à trois miroirs, qui produit des images tellement «bougées» qu'elles en deviennent abstraites.


Alvin Langdon Coburn, Vortograph
Estimation : 180 000 à 220 000 $.
Sotheby's New York, 27 avril 2004.
Dépasser la barre des 200 000 $ ?
Rayogramme ou vortographe ? Le vortographe est clairement le pionnier. Il devance même les schadographies de Christian Schad, réalisés en 1918. En ce qui concerne la cote, Coburn est également en tête mais de façon moins significative : un vortographe a été vendu par Christie's à 197 000 $ en mai 2003 contre un rayogramme à 175 000 $ chez Sotheby's en octobre 2000. La querelle en suprématie pourrait être provisoirement réglée grâce à la quasi-simultanéité des enchères new-yorkaises. En fin de journée, le 27 avril, Sotheby's propose un Rayogramme avec les formes d'un vase et de fleurs (1926). Estimé entre 150 000 et 250 000, c'est l'un des trois rayogrammes réalisés lors d'une même session (les deux autres sont au Getty Museum). En même temps, Christie's présentera un vortographe de 1917, estimé entre 180 000 et 220 000 $. La similitude des évaluations a quelque chose de délicieux : elles ont toutes deux pour barycentre 200 000 $…


 Charles Flours
27.04.2004