Le précieux cadeau de Marie-Antoinette

Vendredi, les salles new-yorkaises de Christie’s accueillaient les chefs-d’œuvre du mobilier français de l’Ancien Régime. Parmi les 230 lots de livres et de manuscrits, dont une série de lettres autographes d’hommes d’état américains (Thomas Jefferson, Andrew Johnson ou Abraham Lincoln), elles proposent aujourd’hui un rarissime album composé de vues aquarellées et de plans du Petit Trianon. Si Marie-Antoinette aimait à offrir à ses proches ces souvenirs de sa résidence versaillaise, on n'en connait que peu d’exemplaires. L'un, offert à Gustave III de Suède, est conservé à Stockholm. L'autre, destiné à l'archiduc Ferdinand de Lorraine, est aujourd'hui à la bibliothèque Estense de Modène. Un dernier enfin fut donné au grand-duc de Russie et appartient à la bibliothèque de Pavlosk.

Ce recueil relié de maroquin rouge fut commandé en 1781 et certainement offert par la reine à son frère, l’empereur Joseph II. Il contient cinq superbes aquarelles de Claude-Louis Châtelet ainsi qu’une carte d’ensemble réalisée par l’architecte de la reine, Richard Mique. Document historique important, il illustre les transformations entreprises dès 1779 dans les jardins du Petit Trianon et offre de précieuses images de ce que l'historien Pierre-André Lablaude nomme «le plus parfait exemple des jardins organisés dans le style anglais dans les dernières années de l’Ancien Régime» dans son ouvrage récent consacré aux jardins de Versailles. On y retrouve le petit théâtre où la reine joua le rôle de Colette dans Le devin du village, une pièce populaire de Rousseau, le petit Temple de l’amour bâti sur une île au milieu d’un lac artificiel ou le jeu de bague chinois, un manège qui était actionné à la main par des hommes cachés sous terre et fut démonté à la Révolution.