Anselm Kiefer, Ton âge et mon âge et l'âge du monde, 1997, 470 x 900 cm. Courtesy Anthony d'Offay Gallery, London.
| | Anselm Kiefer, entre histoire et cultureLa fondation Beyeler propose une rétrospective de l'artiste allemand. Voyage dans le dédale d'une œuvre.
En 25 tableaux aux dimensions monumentales et 11 gouaches , la fondation bâloise entreprend de présenter une rétrospective de l'œuvre d'Anselm Kiefer (1945- ), depuis ses débuts, dans les années 70 à ses travaux les plus récents. Quatre phases sont distinguées au sein de sa production, correspondant à quatre types de réalisations : les «Dachboden-Bilder» (les tableaux de greniers, 1970 à 1980), les «Steinerne Hallen» (salles de pierre, 1985 à 1990), les «Archaischen Architekturen» (architectures archaïsantes, 1990 à 1998) et les «Kosmos-und Sternenbildern» (images cosmiques et sidérales, 1999, 2000).
Si l'œuvre possède plusieurs facettes, comme cette succession de séries le suggère, elle n'en est pas moins unitaire, témoignant d'une constance dans les préoccupations de l'artiste. Kiefer, à contre-courant, n'a de cesse d'interroger les thèmes de culture et d'histoire, exhumant notamment celles de son pays, l'Allemagne. Les thématiques abordées, l'iconographie choisie ont souvent déconcerté tant elles étaient empreintes de cette germanitude qui effrayait encore. Si l'œuvre est, sans conteste, sombre, se référant parfois au romantisme allemand, il n'y a chez lui aucun passéisme, aucune nostalgie ni complaisance, seulement le courage de questionner, à l'heure où tous veulent oublier.
Les premières réalisations sont souvent qualifiées d'«intimistes», sortes d'architectures intérieures peintes dans des tons marron, terre, où foisonnent les lignes noires d'un dessin qui, trait récurrent dans ces quinze premières années, vient saturer la surface de la toile, dans un style très linéaire. Les salles de pierre poursuivent cette peinture du "construit", abordant cette fois, l'architecture fasciste. Le noir et le gris sont omniprésents et là encore, le trait se fait graphique, rappelant parfois l'art germanique de la gravure. La peinture reproduite ci-dessus appartient à la série des architectures archaïsantes. La vision de Kiefer semble ici s'étendre ; des greniers, salles voûtées et autres intérieurs, l'on passe à des vues «panoramiques», d'extérieurs. Le trait se fait moins appuyé, les tons s'éclaircissent. Les dimensions, 5 x 9 m., trouvent, dans l'architecture de Renzo Piano, basée sur une structure horizontale, un espace à leur mesure. Les «tableaux sidéraux» achèvent cette exploration de l'espace, prenant pour sujet, non l'architecture de pierre ou de brique mais celle de la voûte céleste, dans des formats toujours monumentaux.
| Raphaëlle Stopin 29.10.2001 |
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