La dernière peinture de Gustave MoreauDans sa vente d'art européen du 19e siècle, Christie's propose deux toiles du peintre symboliste.
| Gustave Moreau, Saint Sébastien
et ses bourreaux, vers 1870
Estimation : 140 000 / 180 000 £ |
Contrairement à Delacroix, dont l’atelier fut dispersé lors d’une vente posthume, amenant sur le marché un nombre important de toiles et de dessins, Gustave Moreau avait décidé de léguer l’ensemble de son œuvre à l’Etat, soit près de 15 000 pièces. « Seules 500 ou 600 œuvres répertoriées vendues par Moreau de son vivant circulent sur le marché, si on excepte quelques petits dessins qu’il a pu offrir à des amis », explique Geneviève Lacambre, conservateur du musée Gustave Moreau. Il n’est donc pas si fréquent de réunir dans une vente des œuvres de l’artiste, a fortiori des peintures.
C’est le cas aujourd’hui. Au cœur d’une vente consacrée à l’art européen du 19e siècle, Christie’s propose une petite huile sur panneau, Saint Sébastien et ses bourreaux, et une grande huile sur toile, Sainte Cécile. Toutes deux illustrent un talent qui valait à Moreau l’admiration de Zola : sa capacité à inventer une iconographie nouvelle pour des sujets mille fois représentés. Ainsi, la vierge romaine, sainte patrone de la musique, est assise devant un château se découpant sur un paysage de lac, au clair de lune. Elle a abandonné son instrument pour se concentrer sur le chant des anges qui lui annoncent son prochain martyre.
| Gustave Moreau, Sainte Cécile,
1897. Est. : 500 000 / 700 000 £ |
Ces deux tableaux témoignent aussi de son évolution stylistique. Créé vers 1870, Saint Sébastien est placé sous l’influence romantique de Chassériau, qui fut le maître de Moreau. Les effets de couleurs chaudes et le halo doré rappellent directement les travaux de Delacroix. Vingt-sept ans plus tard, Sainte Cécile est traitée de manière presque orfévrée. Ce style très fini, proche de celui du célèbre Jupiter et Sémélé (1895), est propre aux dernières créations de l’artiste. En 1997, l’exposition L’Inde de Gustave Moreau au musée Cernuschi montrait qu’il portait la marque de l'intérêt de l’artiste pour les miniatures perses et indiennes. Estimée à 500 000 £, cette toile est exceptionnelle à plus d’un titre. Elle est l’une des rares œuvres de grand format réalisées par Moreau pour un collectionneur. Si on en croit son commanditaire, Baillehache, elle fut achevée en 1897. C'est ainsi la dernière œuvre qui soit sortie de l’atelier du peintre qui devait s’éteindre un an plus tard.
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