Vittorio Sgarbi, secrétaire d'Etat à la Culture du gouvernement italien, © D.R.
L'obélisque d'Axoum, à côté du siège de la FAO à Rome.
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| | Le gouvernement italien va-t-il rendre l'obélisque d'Axoum à l'Ethiopie ?Les Ethiopiens le réclament en vertu d'un traité de 1947, les Italiens veulent le garder : l'obélisque d'Axoum fait jaser tout Rome.
Il trône devant le siège de la FAO, sur un grand boulevard romain. L'obélisque rapporté d'Ethiopie en 1937 par les armées de Mussolini va-t-il déménager ? En vertu d'un accord de restitution signé il y a plus de 50 ans, il aurait dû regagner depuis longtemps sa patrie. Les choses semblent s'accélérer puisque le ministère des Affaires Etrangères italien a provisionné les fonds nécessaires à son transport, environ 10 millions de francs. Mais un trublion s'oppose farouchement à la translation de la relique : Vittorio Sgarbi, le critique d'art le plus médiatique de la péninsule, secrétaire d'état à la culture depuis quelques mois dans le gouvernement Berlusconi. Nous l'avons interrogé à ce sujet.
Il semble y avoir désaccord entre vous et le ministère des Affaires Etrangères.
Vittorio Sgarbi. Pas du tout. Je suis pour le respect des traités. Mais l'affaire de l'obélisque d'Axoum exige au moins deux réponses. En premier lieu, nous devons restituer l'obélisque puisqu'il y a eu un traité en ce sens. Mais nous ne le restituons pas car nous voulons que les exigences de conservation priment sur les raisons politiques. L'obélisque d'Axoum est arrivé en Italie en plusieurs morceaux et a subi ici une restauration qui est un petit chef-d'oeuvre. Le renvoyer en Ethiopie imposerait immanquablement qu'on le rompe...
Pourquoi la restitution serait-elle si périlleuse ?
Vittorio Sgarbi. La situation politique a changé : l'Ethiopie n'a plus d'accès à la mer. Si on le transporte par bateau au départ de Naples, l'obélisque arrivera dans un port de l'Erythrée, qui est l'ennemi juré de l'Ethiopie. Si, en revanche, on veut le transporter en avion, cela ne simplifie rien (ndlr : il mesure 24 mètres de long et pèse plus de 150 tonnes). Arrivé à l'aéroport, il devra être convoyé en camion sur des routes de terre, ce qui rend inévitable son effritement.
Que proposez-vous ?
Vittorio Sgarbi. Nous disons aux Ethiopiens : ne faites pas comme la mauvaise mère dans le jugement de Salomon, qui était prête à ce que l'enfant soit coupé en deux, même si cela signifiait sa mort. La métaphore de Salomon est importante : ne vaut-il pas mieux garder l'obélisque entier en Italie que de le rendre en morceaux à l'Ethiopie ? Plusieurs possibilités sont à l'étude avec le ministère des Affaires Etrangères. L'une d'elles serait de proposer à l'Ethiopie que les alentours de l'obélisque à Rome bénéficient de l'extraterritorialité, c'est-à-dire qu'ils deviennent territoire éthiopien.
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