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Musées

Lous Durameau, Le Retour de Bélisaire, musée Ingres, Montauban


Le tableau de… Georges Vigne (directeur du musée Ingres à Montauban)

Le retour de Bélisaire : cette oeuvre de Louis Durameau, longtemps oubliée puis retrouvée par hasard, est à l'origine du néo-classicisme.

Le Retour de Bélisaire a été peint en 1776 pour le comte d'Angiviller, qui était le directeur des Bâtiments du Roi, c'est-à-dire le Jack Lang de l'époque. Lorsqu'il a été présenté, il a fait énormément parler de lui. C'était la première fois que l'on peignait ce genre de sujet en France, qui exaltait le thème de la vertu. On y voit le fameux général byzantin, condamné à la mendicité après avoir eu les yeux crevés sur ordre de l'empereur Justinien, revenir chez lui. On ne peut pas le confondre avec d'autres aveugles fameux comme Oedipe ou Homère : Bélisaire recueille les aumônes dans son casque de soldat... Le Bélisaire de Durameau précède de six ans un autre Bélisaire, celui de David, conservé à Lille et dont nous possédons au musée Ingres une esquisse par l'un de ses élèves. Cette extraordinaire vogue de Bélisaire, qui véhiculait pêle-mêle des thèmes patriotiques, de fidélité à la patrie, de gloire militaire et de générosité avait été lancée par un roman de Marmontel en 1767.

On a toujours parlé du Retour de Bélisaire comme du tableau fondateur du néo-classicisme français. Mais l'on en parlait aussi comme de l'Arlésienne de l'art. Sa trace avait été perdue et on ne le connaissait que par une gravure, les collections du comte d'Angiviller ayant été rapidement dispersées après la chute de Louis XVI. Le tableau est bien passé en vente publique dans les années 1970 mais les spécialistes s'en sont aperçus après coup... Un jour, en 1990, je me suis rendu chez un marchand de tableaux parisien, pour un achat. J'avoue que mon sang n'a fait qu'un tour : j'avais devant moi l'œuvre tant recherchée ! Malheureusement pour l'artiste, heureusement pour moi, Durameau est aujourd'hui oublié et le prix demandé entrait dans nos moyens. Vous pouvez imaginer que je n'ai pas laissé passer l'occasion. Après deux siècles de recherches ! Outre les deux précités, nous possédons aussi un Bélisaire par Peyron, le grand rival de David, dépeignant le général au milieu des bergers, et un par Débia, un ami d'Ingres, montrant le héros accueilli par les bergers. D'une certaine façon et par hasard, nous sommes devenus le plus grand musée consacré à Bélisaire...


  Propos recueillis par L'Art Aujourd'hui
31.08.2001